lundi 5 mars 2018

Populaire, le catch !


Organiser un gala de catch [le samedi 24 février dernier] en soutien à notre asso de chômeurs, l’Apeis ? Si l’idée faisait marrer tout le monde, peu semblaient y croire. La municipalité d’Ivry mettait à notre disposition le gymnase Auguste Delaune, temple du handball d’une jauge de 1477 places ; on avait 500 affiches et 5000 flyers à dispatcher ; une dizaine de catcheurs de l’ABCA (la plus vieille école de catch de France) ; une fanfare de 13 personnes (le Bellette Brass Band !) ; la cantine des Bokhalés qui préparait plus de 500 repas ; des fûts de bière… et moults frais divers. Fallait pas se louper, sous peine de transformer une soirée de solidarité en gouffre financier. 

Mais surtout, au-delà des questions triviales de pognon, ce gala allait prouver ou infirmer ce que l’on défend depuis si longtemps (dans ChériBibi et ailleurs) : la culture populaire, tant méprisée des élites, est l’antithèse de cette « culture de masse » décérébrante et mercantile qu’on nous sert matin, midi et soir. La culture populaire, culture de classe, fabrique de la fraternité et, de fait, peut réunir un public éclectique autour de bonheurs combatifs.

Résultat ? 1394 entrées (1500 selon Le Parisien), autant dire un carton plein pour ce gala sur lequel peu auraient vraiment parié, sauf nous. Une soirée rare, exceptionnelle, chaleureuse, drôle, politique, amicale… et pleine de sens. Un public qui ressemblait à la vie, la vraie : jeunes, vieux, femmes, hommes, rockeurs, Roms, prolos avec ou sans boulot, militants, voisins ou venus de loin. Voilà comment on fête les 30 ans de l’Apeis (et la sortie du dernier ChériBibi), avec un grand et beau spectacle populaire. Et un gros doigt à ceux qui n’ont que mépris pour cet adjectif, « populaire » ; à ceux qui rabâchent qu’on ne s’adresse qu’à des « niches » et que le peuple dont on parle tant n’a que faire de nos sommaires. 

Bien sûr, hors le bonheur et la joie ressentis et partagés, cette soirée nous permet d’avoir des moyens pour continuer à nous battre afin de faire valoir les droits de celles et ceux qui sont stigmatisés, chômeurs, précaires, sans droits. Mais surtout, elle a prouvé la justesse et la nécessité de ce que l’on défend dans nos pages et nos actions. Alors oui, aujourd’hui nous sommes émus et fiers. Et fiers d’être émus. Merci à toutes, à tous. La lutte des classes a vraiment de la classe. 

Daniel Paris-Clavel, revue ChériBibi et co-organisateur du gala